Revue de Hongrie 10. (1912)

15 septembre - La découverte d'une littérature: France et Hongrie (fin.), par M. Henri Tronchon, agrégé d'Université

228 REVUE DE HONGRIE dables, et disciplinées par l’intuition passionnée d’un roman­tique de génie, ne soulèvera de longtemps à Paris les «trépi­gnements inouïs» qui l’accueillirent à Budapest. (x) Mais on connaîtra mieux d’abord la Hungária de Liszt, sa Messe Hongroise, son oratorio de Ste Elisabeth de Hongrie, et surtout ses quinze Rhapsodies Hongroises. Et, de Weimar, ce Hongrois de Paris leur donnera pour préface, après coup, son curieux ouvrage Des Bohémiens et de leur musique en Hongrie (1859) qui, sous l’invocation de Hegel et de Goethe, rapporte à la Hongrie autant qu’aux Tziganes eux-mêmes «l’éloquence poignante et la rhétorique élégante de leur art», qu’elle a «nourri de son blé et de ses vignes, mûri à son ombre et à son soleil, acclamé par ses admirations ». (2) Réparant un long oubli, la Revue Britannique, dès 1851, consacre une étude aux historiens, mémoriographes et roman­ciers de la Hongrie, Eötvös, Jókai, Szilágyi, Kossuth; elle a donné en extraits le Notaire de Village d’Eötvös ; elle traduit bientôt la Famille Bárdy de Jókai, et annonce des traductions de Kisfaludy et Petőfi. (3) Et en attendant qu’Henri Amiel donne à la poésie hon­groise trois de ses Etrangères, (4) que Desbordes-Valmore, seul ou avec Ujfalvy, en traduise les plus belles œuvres dans une prose un peu prosaïque, et que Mendès se lie sur les rives du Neckar avec le Hongrois Emmanuel Glaser qui un jour, à Paris, lui amènera François Coppée,(5) déjà St-René-Taillandier, dans la Revue des Deux Mondes, s’avoue gagné à la poésie hon­groise. C’est d’abord (1851) une simple fin d’article, où la littérature magyare apparaît encore, liée à la germanique. Mais plus tard (1860) il étudie, d’après les traductions alle­mandes du Hongrois Kertbeny, les «rapsodes de l’histoire nationale» et Petőfi tout le premier. Au moment où il y est «plongé», il reçoit à Montpellier la visite de Teleki, et le voit un mois durant : « que de longues promenades faites ensemble, (h H. Berlioz, Mémoires, II, p. 212, cf. J.-G. Prudhomme, La Damnation de Faust (Cycle Berlioz 1896), p. 192, 198. (2) Liszt, Des Bohémiens, p. 13, 346, 241, 347. (3) Revue Britannique, juin 1850, janvier 1851, octobre 1854. (4) Amiel, Les Etrangères, p. 23, les Nuages (Petőfi), p. 81, la reine Elise (Arany), p. 225 (Rythmes nouveauxJ, Mon premier-né (Petőfi). (5) Catulle Mendès, Légende du Parnasse contemporain, p. 207 ; Mendès traduira en 1869 les Sternlose Nächte de Glaser.

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