Le Moment, Juiliet 1937 (Année 5, no. 707-733)

1937-07-22 / no. 725

BUCAREST ANNEE - N’725 BDCAK EST 15, rue Brezolanu Rédaction, Administration Tél. S.10.40 Direction Téléphone: 4.25.34 Imprimerie et Ateliers de Photogra­vure „LE MOMENT’* 3, rue Arist. Demetriade. Tél. 4.56.61 Directeur j ALFRED HEFTER TaJe p&sfol* pttye« ê4’ « ? approbation £f<u 247.592} 1Ô55 dè\P> 8 Pages 3 Le! Le Moment Journal de Bucarest Quotidien illustré d’informations Politiques, Economiques et Sociales LEVONS LE VOILE SUR LE CONFLIT SINU-JAPONAiS Les opérations japo­\ 9 niaises contre Pékin, Jx A et le Peï-Ho const i-JmjÛK tuent, à n’en pas dou­­*Æ w VU ter, un. grave échec pour lia politique russe en Extrê­­me-Oïùent. • * * A la fin de la guerre Sino-Japo­­îniaise les Russes ise Sont posés com­me lés protecteurs die la Chine. Soutenus par la Framce et l’Alle­magne ils frustrèrent le Japon des fruits de sa victoire. Le traité de Simonioseki qui donnait presque la Msiadchourïle aux Japonais, fut rendu caduc. Le 3 juin de 1896 un traf,té d'alliance fut signé entre la Russie et la Chine, par le prince Lobarioff et Li-Huiny. Les Russes profitèrent de Falliance chinoise pour se faire concéder des avanta­ges stratégiques, des voies ferrées, une sorte de tutelle administrative sur Ha Mandchourie, par la conven­tion du 8 septembre 1896. Le 27 marfis 1898 les Russes, qui soute­naient les Chinois comme la corde le pondu, se font concéder le Liao­­t.oung, c’est à dire la région de Daïrem et de Port-Arthur. Ce port, le seul que la Russie ait jamais possédé sur une mer libre a été la oaïuse première de la guer­re Russo-Japonaise. Il a, ein plus, éveillé lia méfiance des Chinois, quli se sont bien ren­du compte que le golfe de Pe Tchi- Li était dorénavant sous le con­trôle effectif des Russes. Les .impatiences de la politique russe, poussée par les intrigues de Cour et par des tripotages de hauts personnages, malgré les avertisse­ments de Witte, onit déclenché la guerre contre le Japon. La Russie a été carrément battue. Le traité de Portsmouth faisait passer au Japon, la plupart dies concessions que les Russes avaient arrachées à la Chine, en Mandchourie. Eli trente ans de tutelle, les Ja­ponais sont arrivés à développer considérablement cette vaste con­trée. La population, de la Mand­chourie a passé de quelques mil lions en 1906 à 30 millions en 1930, Son commerce extérieur de 52 mill­­lions de thaels en 1907 à 750 mil­lions en 1929. La guerre mondiale a donné aux Japonais le „territoire à bail” al­lemand — Kiao-tchéou et Wei-hai- Wei —- en face de Port-Arthur. La guerre civile en Chine leur a permis de s’infiltrer plus avant en Mandchourie. Leur remarquable esprit d’intrigue a trouvé un tér­­ralin extrêmement favorable dians les luttes des généraux chinois. Malgré la conférence de Washing­ton et Fentente anglo-américaine, les japonais ont continué, imper­turbablement leur politique impé­rialiste dalns Ja Chine du Nord. • • * Les Russes ont retrouvé un mo­ment favorable. Devant la menace japonaise leur ambassadeur Ca­­rachan, secondé par le général Blucher a été un certain temps, le conseiller des nationalistes chi­mie. Mais le diplomate et le mili­taire ont, de nouveau, à la mode slave, dépassé la mesure. Tchang- Kai-Tcheck Les a mis à la porte. Il a fait plus ; il s’est entendu avec le maréchal Chang-So-Ifin, dictateur de Moukden, qui jusqu’alors pas­sait pour être une créature japo­naise. Mais Chang-So-Lin a été oppor­tunément assassiné en 1928. Les brigandages se sont succédé, sur un rythme plus frequ-ant qu’il n’est coutume même en Mandchourie, sous la dictature de l'inconséquent Chang-Sueh-Liang, son fils et suc­cesseur. Et le Japon „s’est vu obli­gé” d’intervenir pour assurer l’or­dre et ses intérêts. * * % Le 1-er mars 1932, le Japon eriigeait la Mandchourie, à l’aide d’un „conseil national”, en Empire. L’empereur destitué de la Chine, ,1e dernier descendant de la race des Empereurs mandchous, Pou- Ji, monta sur le trône. Ce Fils du Ciel aux portes de son ancien em­pire. Les Russes se sont laissés faire. Ce qui plus est ils vendirent aux Japonais le racourci du transi,bé­­riein, qui allait de Mar.dculii par Puogranitchnaïa à Vladivostoc. Kc * >1« Le parti militaire qui gouverne èn fait le Japon, désire vivement l’accélération de l’action japonaise sur le continent asiatique. Il s’est soulevé contre ses chefs, il a assas­siné le ministre de la guerre, il a renversé des gouvernements, il veut que le Japon agisse, „qu’il suive la voie triomphale de ses destinées“. Ecoutez ce ministre de l’Inté­rieur parlant aux préfets de l’Em­pire... ...„La mission de la race japo­naise est de guider le peuple chi­nois. L’incident de Lou-Kou Chiao est le bien venu. Il servira à con­vaincre des chinois de la nécessité de coopérer avec le Japon“. (Suite en page 6) Le chateau de cartes de la non­intervention La question d’Espagne est la pins difficile, la plus grave et la pins complexe de celles que doit résoudre l’Europe Par's, juillet 1937 On croit d’une façon à peu près générale que les délibérations du Comité de Non-Intervention de Londres ont pour but de différer autant que possible la sortie de l'impasse où il est engagé depuis le fameux „Incident” du Leipzig. Et il ne manque pas de gens de bonne foi qui se montrent satis­faits de la tournure que prennent les négociations sur le problème espagnol. Nous ne pouvons parta­ger cette satisfaction, car nous voyons la situation internationale graduellement s’aggraver chaque jour. Nombreux sont ceux qui, se lais­sant tromper par leurs désirs, ne savent pas découvrir la réalité profonde du problème espagnol. Et bientôt vont s’écrouler les cha­teaux de cartes dressés par les Chancelleries, lesquelles, pour ne considérer que la commodité d’au­jourd’hui, ne voient pas les risques énormes de demain. Un problème européen Les problèmes dont la portée historique est réelle n’admettent pas certains traitements. Si on ne les attaque pas avec les méthodes qu’exigent leurs véritables condi­tions, res questions se eompltqtiFnt et s'aggravent. C’est à oette caté­gorie qu’appartiennent celles que l'on discute à propos de la guerre d’Espagne, dont la valeur et la signification sont internationales, Il y a un an le conflit espagnol étai! tout simplement une guer­re civile et revêtait l’aspect d'un problème national; Aujourd’hui il est devenu une guerre pour la domination de la Méditerranée et s'est transformé en problème international, M. AUGUSTO BARCIA, an­cien président de Conseil et an­cien ministre des Affaires E- trangères d'Espagne, dans cet article qu'il a envoyé pour „Le Moment", attire l'attention sur ce fait et, inspiré par le plus ar­dent sentiment de patriotisme, demande aux Puissances de ré­duire le conflit, s'il en est en­core temps, aux proportions d'une question intérieure. Autrement — conclut-il — „lorsque le mal se sera générali­sé, le danger sera inéluctable". et qu’il est impossible de transfor­mer ou de dénaturer au moyen d’habiletés ou de fictions. Si Le conflit était exclusivement espag­nol,‘jamais' if T»'aurait atteint la portée qu’il connaît et jamais H ne risquerait d’entraîner les con­séquences qu’il doit inévitablement avoir. On ne comprend pas comment tous les hommes qui sont au pou­voir dans les principaux pays eu­ropéens sont tombés dans l’erreur inexcusable de vouloir confiner la guerre d’Espagne à un problème purement espagnol. Comme si les hommes, si puissants soient-ils, a­­vaient la faculté de changer la nature des choses. La question d’Espagne est la plus difficile, la plus grave et la plus complexe de celles que doit résoudre l’Europe. Le conflit es! des plus dangereux L’Espagne est le théâtre du con­flit le plus dangereux qui puisse actuellement se présenter à notre Vieux Continent. On est unanime­ment d’accord pour» reconnaître qu’il affecte le „statu quo” médi­terranéen. Dans ces conditions, on doit se demander : ,, le statu quo” méditerranéen n’est-il pas l’édifice historique qui s’est élevé à travers les luttes séculaires en­tre l'Espagne et l’Angleterre, l’Espagne et les Pays-Bas, l’Es­pagne et la France, l’Angleterre et la Hollande, la France et l’An­gleterre, la France et l’Europe, la France et l’Allemagne, luttes qui, commencées au XVI-ème siè­cle, se poursuivent encore de nos jours? Augusto Barcla Ancien Président du Conseil et Ministre des Affaires Etrangères d’Etepagne (Suite en page 6) Karlovy-Vary, 18 juillet Le jour où notre lettte sur les difficultés de la politique intérieure tchécoslovaque paraissait ici même, on annonçait en dernière page, de Prague, la démission du gouver­nement Hodza.Vf * * II se peut qu'à cette heure un nouveau gouvernement Hodza soit constitué. Le président de la Ré­publique ne saurait envisager dans les circonstances actuelles une au­tre coalition que celle basée sur une majorité de l'ancien cabinet Hodza. ------­Officiellement on avait annon­cé que la raison de la démission du cabinet était la divergence d'opi­nion, concernant le prix des céréa­les. La vraie cause était plus pro­fonde et beaucoup plus étendue au point de vue politique. Ce n’était ni l'affaire de 60 millions de cou­ronnes réclamés par V augmenta­tion des prix, ni l'affaire de la con­stitution d’une réserve de 20.000 wagons de blé pour les nécessités de mobilisation, qui aurait pu dé­terminer la démission du ministre des Finances, M. Kalfus, et en plus la retraite du cabinet et la dénon­ciation de la coalition gouverne­mentale. Cette coalition est basée sur une entente autour d’un programme minimal, entre les partis de gau­che (les sociaux-démocrates, les socialistes-nationaux) et les agrai­riens avec les socialistes allemands, les allemands activistes avec trois autres fractions professionnelles moins importantes. L’axe centrale du régime était formé par les socialistes et les a­­grairiens. Or, c’est cette axe là qui a commencé à fléchir, surtout à cause de la forte pression exercée par l’extrême droite sur le parti agrairien, lequel n'a pas hésité à créer nombre de difficultés au pré­sident du Conseil bien qu’il fût le représentant du parti dans le gou­­vernemer* et son chef effectif. L'aile droite du parti agrairien, groupée autour de „Venkov" poussé constamment le parti vers a une politique qui venait à l'encon­tre des intérêts des socialistes ris­quant de compromettre leur popu­larité dans le pays, leur force é­­lectorale et leur prestige parlemen­taire. C'est ainsi que les polémiquès entre les partis de gauche et les agrairiens sont devenues dernière­ment assez violentes. Les socialis­tes se sont déclarés d'une façon catégorique contre l’élargissement de la coalition gouvernementale par l'introduction des représentants de droite, contre les sacrifices fi­nanciers demandés par les agrai­­riens afin de protéger les grands propriétaires, les vrais bénéficiai­res des dernières lois agraires, éco­nomiques et financières, contre les élections communales et les élec­tions générales dans les conditions politiques actuelles, attitudes qui n’ont pas manqué de provoquer une forte réaction de la part des agrairiens. - Après la démission du gouver­nement qui n’était plus que la sui­te d'une série de frictions à l’in­térieur du cabinet, l'organe offi­ciel des allemands, (Sudètes) „Die Zeit’’ écrivait: „Au cas où on ar-rive à une solution rapide de la crise, la situation politique reste­ra la même, étant donné qu’on ne pourra plus diriger la vie publique et économique par des compromis quotidiens entre la gauche et la droite". Les partis de gauche répondent à cela en suggérant l'éventualité de la constitution d‘un cabinet de techniciens choisis certainement parmi les hauts fonctionnaires fi­dèles au régime. En attendant, les socialistes ac­cusent les agrairiens tchèques: 1) D'embarrasser la vie publi­que à un moment politique inter­national des plus troubles et des plus difficiles. 2) D'avoir renversé un cabinet présidé par leur propre représen­tant. 3) De poursuivre une politique économique à leur bénéfice exclu­sif, quoique les membres impor­tants du parti constituent une ca­tégorie de „nouveaux riches” de date récente. Le „Lidove Noviny", officieux des socialistes nationaux et l'or­gane préféré du président de la République écrit: „On a acquis l’impression que les mécontents du parti agrairien ont déterminé ou­vertement la crise pour renverser le cabinet Hodza”. Le développement de la politi­que intérieure tchécoslovaque con­firme ce que nous avons écrit dans notre lettre précédente, se réfé­rant à la situation intérieure du pays ami: 11 faut s’attendre à une offensive d'une très vaste étendue de la part des organismes de droite, lesquels dirigés par une fraction agrairienne, sous la pres­sion des sudètes et sous l'inspira­tion de Berlin, essaieront de ren­verse r le régime politique actuel, de changer l'orientation de la poli­tique étrangère, le système et les méthodes de gouvernement, en écartant du pouvoir dans ce but, les personnes qui dirigent actuelle­ment la Tchécoslovaquie. Il s’agit donc d’une manoeuvre de grande envergure, qui ne réus­sira pas, qui ne saura réussir sans ébranler profondément la consti­tution de l’état, sa base nationale, sa force homogène et son prestige international. Les élections générales prouve­ront que ceux qui espèrent le con­traire ne manqueront pas de subir une défaite totale et plusieurs fois significative au point de vue na­tional. Alfred Hefter SOUS LA DOUCHE DES ÉVÉNEMENTS que La situation internationale empire de jour en jour. Le „Dai.lv Herald” LE JOURNALISTE.— Sous ceitte douche, la chaleur r." ne parait plus un malheur si granù Kl II I 1 JEUDI 22 JUILLET 1937 ; EAMON [ = =2 J DEVALERAI * £ Ê Ü I Dre en page 5: | £5 sa ’1 par Thomas Greenwood ! Rien n'est plus profitable à la société que la conviction que tu es un être exceptionnel, le centre de l'univers, l'élu. Mais rien n'est plus nuisible — et à toi en premier lieu — que de considérer les autres comme des imbéciles. * Je me connais pas d’efforts plus pénibles que ceux de l’homme qui veut prouver qu’il n’est pas un im­bécile. « * « Le pessimisme en impose. * * * On peut arriver sans être un ar­riviste. On peut être arriviste sans parvenir. » * * Plaisir: vice que nous maîtrî­­sons. Vice: plaisir qui nous do­mine. ___, • • • Pour toi, pense avec l’esprit de ton âge. Pour les autres, pense a­­vec l’esprit de leur âge, si tu veux qu’on s'entende. * * * Ceux qui ne font rien attendent d'autrui des actions sur-naturelles. * * * Laissez passer le temps: et le crime même devient un fait histo­rique, consacré, et commémoré. * * * Nul n'est aussi fol qu'il le veut paraître. * * * En même temps que les mousti­ques, Dieu créa une plante dont la fumée les chasse. Nous nous sommes débarrassés des mousti­ques et nous restons avec le tabac. * * * Les lettres exaltent. Les chiffres crétinisent. * * * Laissez toujours à une femme l’impression que c’est elle qui vous a quitté; c'est d'une ironie délicate. » • • Ne mets pas tout le mérite de ton oeuvre dans sa nouveauté; on va bientôt trouver quelqu'un de plus nouveau. • » » Il n’y a aucun mérite à séduire une femme. Le mérite est de sa­voir comment se comporter après l’avoir séduite.* * * Nous donnons des conseils non pouir redresser le monde mais pour montrer au monde que nous som­mes malins. • • • Les jeunes seuls ont des idées. Les idées des vieux sont à autrui. * * * Personne n’est honnête par plaisir. * * * Nous appelons paresseux celui qui reste calme. En fait, seul le paresseux peut travailler avec suite. Les autres dissipent leur énergie à des détails, à des bavar­dages, pour se donner l’illusion d’agir. Même en rêve on ne peut rêver ce que l’on veut. Même les féeries de notre sommeil sont réglées par des forces étrangères à nous. * * # Seigneur, donnez-moi chaque fois lia force de recommencer. * * * Je vous rencontre à pied, belle dame, et vous avez pour moi un délicieux sourire. Vous montez en voiture et vous prenez un air dis­tingué, détaché des choses terres­tres, le regard absent, le front ceint d’utrie aiuréoCie divine. Qu’y; a-t-il de changé? * * * Le valet n’a qu'un maître. Le maître est le valet de tous les va­lets. * * * Pas trop de lectures russes, mes chers confrères. Lisons plutôt les Français. „Profondeur de l’âme", „pouvoir de l'observation", on l’a ou on ne lia pas. Ce quil faut acqué­rir c’est l'art de composer. -X- -x-Si tu paries c’est que tu n'es pas absolument certain; tu cherches à t'encourager toi-même. Victor Eftimiu * * * ,.üillll|jit»"",iiii|||i“.....iii||||i|"""|il|||!li|,,""il|||||i|"""tlll!ili'“

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