Revue de Hongrie 28-29. (1923)

15 avril - Henri-Frédéric Amiel et Petőfi, par M. Antione Radó, membre de la Société Kisfaludy

HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL ET PETŐFI 179 taim », « Mi kék az ég », « Szivem, te árva rabmadár », « Soha­sem volt az szerelmes »). Ce n’étaient pas ses premières ver­sions de Petőfi, car on en trouve deux dans son volume publié en 1876: Les étrangères. Poésies traduites de diverses littératures. Ce sont: « Mon premier-né » (« Fiam születésére ») et « Les nuages » (A felhők). Il y parle aussi de l’idéal d’une bonne traduction de vers, en ces termes : « Ce serait celle qui rendrait, non pas seulement le sens et les idées de l’original, mais ses couleurs, son mouvement, sa musique, son émotion, son style distinctif, et cela dans le même rhythme, avec des vers de même forme et un même nombre de vers ». Mais ses traductions de Petőfi sont loin de réali­ser cet « idéal ». Retournant au poème d’Amiel qui figure comme son œuvre originale, au lieu de l’analyser, il suffira de le mettre à côté d’une version littéraire du poème de Petőfi, afin que le lecteur se rende lui-même compte de la vérité de mon assertion. Les voilà donc: Dans ce lieu fut mon berceau. Voilii bien la verte plaine Où le regard se promène Sans heurter mont ni coteau ; Je reconnais la fontaine, Témoin de mes premiers jeux. Nourrice, de bruits joyeux Ta maison lors était pleine. Il me semble entendre encor Résonner la chansonnette : « Grillon de mai, grillon d'or, Grillon dans l’herbette». Je suis né dans cette contrée, Dans la belle et grande plaine du bas pays hongrois. Cette ville est le lieu de ma nais­sance, Et c’est comme si elle était encor pleine de la chan­son de ma nourrice. Je l’entends encor, cette chanson, Quoiqu’elle se soit tue depuis long­temps : « Hanneton, jaune hanneton ! » Mais on m’ôte de tes bras Encore en ma tendre enfance, Et je ne reviens, hélas ! Qu’à l’âge triste où l’on pense. Oui, vingt ans, vingt ans ont fui. Que de désirs, d’espérances ! Que d’épreuves, de souffrances ! Que de regrets aujourd’hui ! O nourrice ! nourricette ; Le temps s’envole, il a tort : «Grillon de mai, grillon d’or, Grillon dans l’herbette. » Je m’en allais d’ici comme un petit enfant, Et je suis retourné comme un homme mûr. Ah ! depuis ces temps, vingt années se sont écoulées, Chargées de tristesses et de joies ... Vingt années ... comme le temps fuit ! « Hanneton, jaune hanneton ! »

Next